Le chômage bâti pour durer

image_pdfimage_print

Département Analyse et Prévision (Équipe France)

Les chiffres du mois de février 2016 publiés par Pôle Emploi font apparaître une hausse de 38 400 du nombre de demandeurs d’emploi n’exerçant aucune activité (catégorie A). Si cette hausse est à première vue très forte, elle est à prendre avec prudence. Pour rappel, le nombre d’inscrits à Pôle Emploi avait reculé fortement en janvier du fait d’un changement des règles administratives de réinscription. Ainsi, une partie de la hausse s’explique par la normalisation du nombre de cessations d’inscription pour défaut d’actualisation qui s’établit désormais à 218 000 en février après avoir atteint 239 000 en janvier. Par rapport au mois de décembre 2015, où les changements administratifs ne brouillent pas le signal, le nombre de chômeurs inscrits dans la catégorie A a augmenté de 10 500 personnes.

En février, la hausse des inscrits en catégorie A reflète en grande partie le transfert des inscrits des catégories B (-3 000 en février) et C (-32 300) vers la catégorie A. Au total le nombre d’inscrits en catégories A, B, C augmente légèrement (+3 100) mais reste à un niveau inférieur de 15 200 à celui atteint au mois de décembre. La forte baisse des inscrits en catégorie C, regroupant les inscrits à Pôle Emploi en activité réduite longue (plus de 78 heures au cours du mois) constitue un signal négatif, à prendre avec prudence, sur le niveau de l’emploi du mois de février.

Ces évolutions mensuelles doivent être mises en regard des évolutions sur plus longue période. Après huit années de crise qui ont bouleversé l’emploi, les évolutions des demandeurs d’emploi par grands domaines professionnels permettent d’appréhender certaines dimensions de ces transformations. Ainsi, entre début 2008 et fin 2015, le nombre d’inscrits en catégorie A, B et C à Pôle Emploi a augmenté de 2,3 millions, celui des inscrits en catégories A de 1,5 million. Ces demandeurs d’emploi supplémentaires en catégorie A proviennent principalement du secteur des services (+ 1,1 million). Le nombre de demandeurs d’emplois issus des secteurs du BTP (bâtiments et travaux publics) et de l’industrie voient, quant à eux leur nombre augmenter respectivement de 200 000 et 170 000 sur cette même période. Rapportées au nombre de demandeurs d’emplois en catégorie A, ces évolutions montrent une hausse plus rapide des inscrits dans l’industrie et le BTP au début de la crise. Si cette hausse de la part des inscrits issus de l’industrie s’est avérée temporaire (+ 2 points entre début 2008 et début 2009, puis retour au niveau initial début 2011), elle apparaît bien plus durable dans le BTP (+2,2 points entre début 2008 et fin 2015). Depuis 2011, le nombre d’inscrits en catégorie A par grands domaines professionnels croît au même rythme.

 

G1_Chomage (1)

Parmi les 74 familles professionnelles répertoriées par la Dares, au sein desquelles nous avons retenu celles ayant un poids significatif[1], les dix qui ont connu la plus forte augmentation depuis début 2008 sont principalement dans le secteur du BTP. En effet, plus de la moitié des dix professions les plus impactées par le chômage se situent dans ce secteur avec une augmentation comprise entre 126 % pour les conducteurs d’engins du BTP et plus de 200 % pour les ouvriers qualifiés du gros œuvre du bâtiment. En dehors du BTP, les professions ayant connu la plus forte hausse du nombre d’inscrits à Pôle Emploi depuis début 2008 sont les métiers liés à la restauration et au commerce de bouche (148 % pour les cuisiniers et 130 % pour les bouchers, charcutiers, boulangers), ainsi que les aides à domicile et ménagères (+126 %) ou les professionnels de l’action culturelle, sportive et surveillants (+126 %). Ces dix familles professionnelles qui représentaient moins de 13 % des inscrits en catégorie A au début de l’année 2008 ont contribué à hauteur de près de 23 % à la hausse du chômage depuis le début de la crise.

G2_Chomage

 

 

[1] Leur famille représente au moins 0,5 % du nombre d’inscrits en catégorie A, ce qui correspond à plus de 15 000 inscrits en catégorie A pour une seule famille professionnelle.

Soyez le premier à commenter

Poster un Commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*