Peut-on se relever d’une crise bancaire ? Analyse comparée de l’Irlande et de l’Islande

image_pdfimage_print

par Céline Antonin et Christophe Blot

En économie, les miracles s’avèrent parfois être des mirages. L’Islande et l’Irlande en font l’expérience. Ces deux petites économies ouvertes, paradis de la finance libéralisée et dérégulée, havres de croissance au début des années 2000, ont été frappées de plein fouet par la crise financière. La nationalisation quasi-intégrale des systèmes financiers qui en a résulté a pesé sur la dette publique de ces deux pays. Pour endiguer la hausse de la dette et les risques d’insoutenabilité, les gouvernements des deux pays ont, dès 2010, mis en œuvre des plans d’austérité budgétaire, mais avec une différence de taille : l’Irlande appartient à la zone euro, ce qui n’est pas le cas de l’Islande. La dernière Note de l’OFCE (n°25 du 4 février 2013) revient sur la situation financière et macroéconomique récente de ces deux pays afin de montrer dans quelle mesure les divergences de policy-mix peuvent rendre compte de trajectoires de sortie de crise différentes.

Si la crise bancaire islandaise fut amplifiée par une crise de change, la dépréciation de la couronne fut ensuite un facteur de reprise si bien qu’aujourd’hui, la croissance est de retour en Islande. Le PIB a été marqué par une forte volatilité : entre le troisième trimestre 2007 et le deuxième trimestre 2011, le PIB a baissé de plus de 13 % mais il a depuis rebondi de 5,7 %. En Irlande, la volatilité a été moindre et la phase récessive moins longue qu’en Islande (8 trimestres) et de plus faible amplitude (-10,7 %). En revanche, la sortie de crise y est plus timide avec une progression du PIB de seulement 3,4 % depuis fin 2009.

Notre analyse nous conduit à deux conclusions principales : d’une part, la dévaluation interne est moins efficace que la dévaluation externe ; d’autre part, la consolidation budgétaire est moins coûteuse lorsqu’elle est accompagnée de conditions monétaires et d’une politique de change favorables. C’est à la lumière de ces éléments qu’il convient de redéfinir le policy mix optimal en zone euro comme nous le suggérons plus en détail dans le rapport iAGS. Une politique monétaire active est indispensable pour permettre le refinancement de la dette publique Ainsi, la Banque centrale européenne doit intervenir en tant que prêteur en dernier ressort des pays membres. Les pays en situation d’excédents doivent engager des politiques de “reflation” afin de contribuer à résorber les déséquilibres courants. L’ajustement budgétaire doit être assoupli et éventuellement décalé afin de permettre un retour plus rapide de la croissance.