Chômage : évolutions à la carte

 

Département Analyse et Prévision (Équipe France)

Les chiffres du mois de février 2017 publiés par Pôle Emploi font apparaître une légère baisse (-3 500) du nombre de demandeurs d’emploi en fin de mois (DEFM) n’exerçant aucune activité (catégorie A). En intégrant à ces chiffres l’évolution du nombre de demandeurs en catégorie B et C, le nombre de demandeurs d’emploi a cru de 28 800 au cours du dernier mois. Sur un an, le nombre d’inscrits en catégorie A a diminué de 3,2% et celui d’inscrit en catégories A, B, C a cru de 1%.

Les évolutions au cours du quinquennat

Cette publication du mois de mars constitue la dernière publication de Pôle Emploi avant le premier tour de l’élection présidentielle ; elle est donc l’occasion de mettre en lumière un bilan quasi définitif du quinquennat au travers l’évolution du nombre de demandeurs d’emploi depuis le mois de mai 2012.

Entre mai 2012 et février 2017, le nombre de demandeurs d’emplois inscrits en catégorie A a augmenté de 541 500 en France métropolitaine et de 561 400 en France entière. Sur cette période, le nombre de demandeurs d’emplois inscrits en catégorie A, B et C a, lui, augmenté de plus de 1,1 million de personnes.

Le nombre d’inscrits en catégorie A de moins de 25 ans, après une hausse de +60 000 entre les mois de mai 2012 et avril 2013, a entamé une décrue. En février 2017, ils étaient 475 500 inscrits à Pole Emploi, soit 24 500 de moins que 5 ans auparavant. Par contre, l’inversion attendue du nombre d’inscrits en catégorie A âgés de 25 à 49 ans a été très longue à se dessiner et n’est intervenue qu’il y a un an, en février 2016. Malgré une baisse de près de 90 000 au cours des 12 derniers mois, le nombre de demandeurs d’emploi en catégorie A de cette tranche d’âge a augmenté de +256 600 au cours du quinquennat, soit une hausse de 14%. Bien qu’importante, cette augmentation est loin d’être celle ayant le plus contribué à l’augmentation observée du nombre de demandeurs d’emploi en France métropolitaine. En effet, depuis mai 2012, ce sont les inscrits en catégorie A de 50 ans et plus qui ont vu leur nombre progresser le plus, de +309 900, soit une hausse de plus de 50% par rapport au niveau qui était le leur en mai 2012.

Des évolutions géographiques contrastées

Si ces évolutions contrastées de la situation des demandeurs d’emploi selon leur catégorie d’âge sont notables, l’âge est loin d’être l’unique critère discriminant dans l’évolution du marché du travail. En effet, à un niveau géographique fin apparaissent des situations particulièrement hétérogènes (cartes 1 et 2)[1].

L’échelle géographique retenue ici est celle de la zone d’emploi. Arrêtées par l’INSEE, ces zones constituent « un espace géographique à l’intérieur duquel la plupart des actifs résident et travaillent, et dans lequel les établissements peuvent trouver l’essentiel de la main-d’œuvre nécessaire pour occuper les emplois offerts ». Utilisé pour les études locales du marché du travail, ce zonage a le mérite d’arrêter des frontières territoriales pertinentes permettant l’analyse en termes de « bassin de vie », concept basé sur les flux de déplacements domicile-travail des actifs observés lors du recensement.

La comparaison des taux de chômage, au sens du BIT, entre le deuxième trimestre 2012 et le troisième trimestre 2016 permet de mettre en lumière les importantes hétérogénéités sur le territoire national en termes de niveau du chômage et de dynamique.

Les zones d’emploi sont regroupées par quintile de taux de chômage au deuxième trimestre 2012. Autrement dit, au troisième trimestre 2012, 20% des zones d’emploi avaient un taux de chômage compris entre 4,4% et 7,5%, et 20% affichaient un taux de chômage supérieur à 11%.

Tout d’abord, il existe d’importantes disparités entre grandes régions géographiques. En 2012, les Hauts de France et le bassin méditerranéen abritaient les territoires les plus durement touchés par le chômage. L’ouest de la France, dont l’activité économique est plus tournée vers le tourisme et les activités tertiaires était moins touché par le chômage en 2012. Néanmoins la montée du chômage au cours du quinquennat n’a pas épargné ces zones d’emploi.

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Si la hiérarchie observée en 2012 n’a pas été bouleversée au cours du quinquennat et si les hétérogénéités de taux de chômage persistent, les dynamiques à l’œuvre sont inquiétantes. En effet, une forte dégradation de la situation de nombreux territoires, pourtant relativement épargnés en 2012, s’est produite. Si quelques zones d’emploi ont vu leur taux de chômage baisser très légèrement ou se maintenir[2] – le plus souvent à un niveau élevé – au cours de la période, la plupart des territoires analysés ont connu une hausse de leur taux de chômage depuis le deuxième trimestre 2012. Les zones d’emploi bretonnes, relativement préservées jusqu’en 2012 des taux de chômage élevés, ont subi une forte dégradation de leur marché du travail (Carte 3). C’est également le cas des zones limitrophes aux territoires aux taux de chômage « historiquement » élevés (pourtour du bassin méditerranéen, nord de la France), mais aussi des territoires limitrophes aux agglomérations telles que Paris ou Lyon qui ont vu leurs taux de chômage largement augmenter au cours de la période.

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[1] Pour des raisons techniques, la Corse et les départements d’outre-mer ont été ici exclus de l’analyse.

[2] Notons que ces évolutions peuvent être expliquées par des mécanismes de mobilité démographique entre bassins d’emplois.




2016 : première année de baisse du chômage depuis neuf ans !

Département Analyse et Prévision (Equipe France)

Les chiffres du chômage du mois de décembre 2016, publiés par Pôle emploi, font apparaître une hausse du nombre de demandeurs d’emploi en fin de mois (DEFM) en catégorie A (+26 100 personnes en France métropolitaine) qui fait suite à une séquence de trois mois consécutifs de baisse. Si l’on ajoute aux inscrits en catégorie A[1] ceux ayant réalisé une activité réduite au cours du mois (catégories B et C), l’évolution mensuelle est stable (-100 personnes).

Les évolutions mensuelles des chiffres issus de Pôle emploi sont très volatiles et doivent être prises avec prudence et analysées sur des périodes relativement longues. Sur un an, la baisse des DEFM en catégorie A s’établit à 107 400 personnes. L’année 2016 est ainsi marquée par une inversion de la courbe du chômage. Une telle évolution du nombre de DEFM inscrits en catégorie A n’a plus été observée depuis 2007 (-250 000 personnes). Le rythme de la baisse est toutefois plus de deux fois inférieur à celui d’alors, l’année 2007 étant marquée par une croissance de l’activité économique plus rapide (2,4%).

Au sein des inscrits en catégorie A, les hommes ont plus bénéficié que les femmes de la baisse du chômage en 2016, mais ils avaient aussi été plus durement touchés auparavant. La baisse concerne les moins de 50 ans. Pour les seniors, l’amélioration ne se fait pas encore sentir, bien que la progression ait très fortement ralenti par rapport à la période allant de mai 2012 à décembre 2015.

En intégrant aux inscrits en catégorie A ceux ayant réalisé une activité réduite au cours du mois (catégories B et C), la baisse sur an est très faible (-2 300 personnes). Le nombre d’inscrits en catégorie C a en effet fortement progressé au cours de l’année (+104 800 personnes). La reprise du marché du travail constatée en 2015, et qui s’est confirmée en 2016 (cf. graphique), s’est d’abord traduite par une reprise de l’emploi précaire (intérim, CDD, temps partiel subi, …). Cette précarité rend floue la frontière entre emploi et chômage et retarde de fait la sortie définitive des inscrits des listes de Pôle emploi.

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Le retournement de la courbe du chômage a concerné les DEFM inscrits depuis plus d’un an et moins de trois ans. Ceux-ci ont pu bénéficier de la montée en charge du plan « 500 000 formations » qui s’est traduite par une forte progression du nombre d’inscrits en catégorie D (+67 400 personnes en 2016). En revanche le nombre d’inscrits en catégories A, B ou C depuis moins d’un an a poursuivi sa hausse malgré la baisse des catégories A du fait de l’augmentation de l’activité réduite. Enfin, l’amélioration de la situation économique ne bénéficie pas encore aux DEFM inscrits depuis plus de trois ans.

Pour conclure, les chiffres de taux de chômage publiés par Eurostat pour l’ensemble des pays de l’Union européenne indiquent que le taux de chômage a évolué favorablement en France (-0,7 point entre décembre 2015 et novembre 2016), au même rythme que celui de la zone euro (-0,6 point).

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[1] – catégorie A : demandeurs d’emploi tenus de rechercher un emploi, sans emploi ;

– catégorie B : demandeurs d’emploi tenus de rechercher un emploi, ayant exercé une activité réduite courte (de 78 heures ou moins dans le mois) ;

– catégorie C : demandeurs d’emploi tenus de rechercher un emploi, ayant exercé une activité réduite longue (de plus de 78 heures au cours du mois) ;

– catégorie D : demandeurs d’emploi non tenus de rechercher un emploi (en raison d’une formation, d’une maladie, …) y compris les demandeurs d’emploi en contrat de sécurisation professionnelle (CSP), sans emploi ;

– catégorie E : demandeurs d’emploi non tenus de rechercher un emploi, en emploi (par exemple : bénéficiaires de contrats aidés, créateurs d’entreprise).




Chômage : forte volatilité, faible baisse

Département Analyse et prévision (Equipe France)

Les chiffres du chômage du mois de septembre 2016, publiés par Pôle emploi, font apparaître une baisse spectaculaire du nombre de demandeurs d’emploi en fin de mois (DEFM) en catégorie A (-66 300 personnes en France métropolitaine). Cette forte baisse fait plus que compenser la hausse tout aussi spectaculaire du mois dernier (+50 200). Au total, sur trois mois, le recul du nombre de demandeurs d’emplois atteint 35 200, troisième baisse trimestrielle consécutive, ce qui n’avait plus été observé depuis le début de la crise au début de 2008. Le chiffre de septembre confirme ainsi le retournement progressif de la courbe des DEFM sur un horizon de temps plus long : depuis le début de l’année, les effectifs en catégorie A ont baissé de 90 000 personnes et de 59 500 sur un an. Si l’on ajoute aux inscrits en catégorie A ceux ayant réalisé une activité réduite au cours du mois (catégories B et C), la baisse mensuelle est moins prononcée (-38 000 personnes), probablement parce qu’une partie des inscrits sans aucune activité a changé de catégorie après avoir retrouvé une activité réduite.

La baisse des inscrits en catégorie A au mois de septembre a bénéficié à part quasi égale aux hommes et aux femmes. Elle s’est toutefois concentrée sur les personnes les moins éloignées du marché du travail : les moins de 25 ans (-27 400, sous l’effet notamment du plan de formation) et les 25-49 ans (-37 300), ainsi que les inscrits depuis moins d’un an (-31 000 en catégorie ABC). La baisse a été marginale pour les plus de 50 ans (-1 600) et les demandeurs inscrits depuis plus d’un an (-7 100 en catégorie ABC).

Ces évolutions mensuelles très erratiques doivent à chaque fois être prises avec prudence. Les chiffres publiés par Pôle emploi sont soumis à des aléas propres à la pratique administrative. Selon Pôle emploi, elles reflètent en partie sur le passé récent la modification des règles d’actualisation d’inscription.

Focus : Le changement de règle d’actualisation et la volatilité des chiffres de Pôle emploi

Ce changement de règle, a priori anodin, a eu pour conséquence d’introduire une forte volatilité mensuelle dans les chiffres des cessations d’inscription pour défaut d’actualisation : chaque mois, certains demandeurs d’emploi n’actualisent pas leur situation (soit parce qu’ils ont retrouvé un emploi, soit par oubli…) et ne sont donc plus comptabilisés comme DEFM.

A partir du mois de janvier 2016, Pôle emploi a ainsi modifié les conditions d’actualisation de la situation des demandeurs d’emploi. Avant janvier 2016, le calendrier d’actualisation était fixé selon la règle :

  • – l’ouverture de l’actualisation relative au mois m avait lieu le 3e jour ouvré avant la fin du mois m,
  • – la relance avait lieu les 8e et 9e jours ouvrés du mois m+1
  • – la clôture de l’actualisation avait lieu la veille du 12e jour ouvré du mois m+1 à 23h59, que ce jour soit ouvré ou non.

Selon ce calendrier, l’intervalle de temps pour l’actualisation reposait sur un nombre total de jours variable (compris entre 18 et 23 jours, graphique) mais d’un nombre de jours ouvrés constant (14).

A compter de janvier 2016, la règle a changé : pour un mois donné, l’actualisation est ouverte le 28 de ce mois (sauf pour les mois de février où l’actualisation est ouverte le 26) et est clôturée le 15 du mois suivant :

  • – envoi par Pôle emploi des déclarations de situation mensuelle (DSM, le 28 du mois m en général ou le 26 en février) ; cet envoi se fait principalement par internet, plus marginalement par courrier postal ;
  • – ouverture de la télé-actualisation (le lendemain de l’envoi des DSM) ;
  • – retours d’actualisation par les demandeurs d’emploi, suivis le cas échéant du calcul et de la mise en paiement de l’allocation par Pôle emploi (pour les demandeurs d’emploi indemnisés, l’actualisation déclenche le versement de l’allocation) ;
  • – repérage par Pôle emploi des demandeurs d’emploi n’ayant pas encore actualisé leur situation ;
  • – relance des demandeurs d’emploi n’ayant pas encore actualisé leur situation (le 11 et le 12 du mois m+1) ; cette relance s’effectue par téléphone, SMS, ou courrier postal ;
  • – clôture de l’actualisation (le 15 du mois m+1 à 23h59).

Il a résulté de ce changement de règles une diminution des nombres moyens de jours d’actualisation, totaux ou ouvrés, une atténuation de la volatilité du nombre total de jours d’actualisation (compris entre 17 et 19 jours) et surtout l’apparition d’une variabilité du nombre de jours ouvrés (compris entre 11 et 14 jours), qui n’existait pas auparavant. Or les jours ouvrés étant plus propices à l’actualisation de situation que les jours fériés, leur plus grande variabilité retentit sur les cessations d’inscription pour défaut d’actualisation. Les mois incluant un nombre important de jours ouvrés affichent des cessations d’inscription moins nombreuses et inversement (graphique). Les évolutions exceptionnellement erratiques des inscrits en catégorie A ces deux derniers mois relèvent en partie de ce phénomène, avec un nombre de jours ouvrés en août (14) qui a favorisé les réinscriptions sur les listes de l’Agence, et par voie de conséquence, un dégonflement des défauts d’actualisation qui s’est répercuté en une forte augmentation des inscrits. Le mouvement inverse s’est produit en septembre avec un nombre de jours ouvrés (13) en diminution. En octobre, ce nombre diminuera encore, pour atteindre 11, ce qui pourrait provoquer à nouveau une hausse des défauts d’actualisation et un effet favorable sur le nombre d’inscrits à Pôle emploi.

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Le chômage en quelques chiffres

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Chômage à contre-emploi

par OFCE, Département Analyse et prévision (Equipe France)

Les chiffres du chômage du mois d’août 2016 publiés par Pôle Emploi font apparaître une forte augmentation du nombre de demandeurs d’emploi en fin de mois (DEFM) en catégorie A[1] (+50 200 personnes en France métropolitaine). Cette forte progression efface en grande partie les améliorations observées depuis le début de l’année. Sur un an, le nombre de demandeurs d’emploi n’exerçant aucune activité reste en légère baisse  (- 10 900 personnes). La hausse des inscrits en catégorie A au mois d’août a touché toutes les catégories d’âge. Si on ajoute les inscrits ayant réalisé une activité réduite au cours du mois, la hausse mensuelle est encore plus prononcée (+76 100 personnes). Les attentats qui ont frappé la France, et notamment celui du 14 juillet à Nice, ont eu un impact négatif sur l’activité touristique venant de l’étranger (hébergement-restauration, activités de loisir) avec des conséquences négatives sur l’emploi des secteurs concernés mais dont l’ampleur n’est à ce stade pas chiffrable.

Ces évolutions, franchement négatives, doivent être cependant prises avec prudence. Selon Pôle Emploi, elles reflètent en partie la modification des règles d’actualisation d’inscription décidée au mois de janvier 2016. Au mois d’août, le nombre de sorties pour défaut d’actualisation a atteint un point bas depuis l’instauration de la nouvelle règle. Ceci s’expliquerait par le nombre de jours ouvrés où il était possible de s’inscrire, particulièrement fort au mois d’août.

Ceci doit nous rappeler que les chiffres publiés par Pôle Emploi sont soumis à des aléas propres à la pratique administrative. Ces aléas ne sont pas nécessairement corrélés avec les évolutions sous-jacentes de l’emploi. En effet, l’analyse des tendances de l’emploi et du chômage nécessite la prise en compte d’autres indicateurs qui capturent mieux les évolutions du marché du travail.

Focus : l’évolution de l’emploi au sens de la comptabilité nationale depuis un an

Malgré un chiffre de croissance décevant au deuxième trimestre 2016, publié vendredi dernier par l’Insee, et la forte augmentation du nombre de DEFM au mois d’août (dont l’évolution est souvent très volatile au mois le mois), il n’en reste pas moins que l’économie française reste créatrice d’emplois dans le secteur marchand depuis le deuxième trimestre 2015. Les créations d’emplois salariés ont ainsi atteint ou dépassé le chiffre de 40 000 par trimestre depuis 1 an, rythme légèrement plus dynamique que fin 2010-début 2011 et qui n’avait plus été observé depuis l’année 2007 (graphique 1).

La reprise molle entamée en 2015 (+1,2 % de croissance) et qui se poursuit en 2016 (+1,1 % d’acquis à la fin du deuxième trimestre) aurait à peine permis de stabiliser le chômage, compte tenu de la croissance de la population active (+0,5 % par an) et des gains de productivité tendanciels (estimés à +0,8 % par an). Toutefois, les créations d’emplois salariés dans le secteur marchand sont stimulées par les mesures de baisse du coût du travail (CICE, Pacte de responsabilité, prime à l’embauche) qui enrichissent la croissance en emplois. Depuis quatre trimestres, les créations d’emplois salariés dans le secteur marchand ont contribué à 75 % des créations d’emplois, le reste se répartissant entre les créations d’emplois dans le secteur non-marchand[2] (pour 17 %) et les emplois non-salariés marchands (pour 8 %).

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La panne de croissance observée au deuxième trimestre, les attentats et le Brexit ne semblent pas remettre en cause la dynamique de l’emploi salarié marchand. Au-delà des derniers chiffres positifs portant sur le nombre d’intérimaires en fin de mois (+0,7 % en juillet), et sur les déclarations d’embauche de plus d’un mois (hors intérim) qui augmentent de 3,7 % en août après une hausse de 0,6 % au mois de juillet, les intentions d’embauches déclarées dans les enquêtes de conjoncture indiquent une poursuite des créations d’emplois dans les services marchands au troisième trimestre, ainsi qu’un net ralentissement des destructions d’emplois dans le secteur de la construction (graphique 2). Concernant les industries manufacturières, les intentions d’embauches sont plus hésitantes au premier semestre, après cependant une nette amélioration en 2015.

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[1] Les inscrits en catégorie A n’ont exercé aucune activité, pas même réduite, à la différence des inscrits en catégories B et C.

[2] Dans le secteur non-marchand, les créations d’emplois sont tirées notamment par les contrats aidés (emplois d’avenir, contrats d’accompagnement dans l’emploi).




La baisse du chômage annoncée par l’Insee confirmée en juillet par Pôle emploi

Département Analyse et prévision (Equipe France)

Les chiffres du chômage du mois de juillet 2016 publiés par Pôle Emploi font apparaître, après les deux hausses consécutives de mai (+ 9 200) et juin (+ 5 400), une baisse du nombre de demandeurs d’emploi en fin de mois (DEFM) n’exerçant aucune activité (catégorie A) de 19 100 personnes en France métropolitaine. Sur les trois derniers mois la baisse est de 4 500 personnes et sur un an, le nombre de demandeurs d’emploi n’exerçant aucune activité s’est réduit de 44 100 individus. Ces évolutions viennent confirmer l’amélioration du marché du travail en France depuis le début de l’année et confirmée à la mi-août par la publication de l’INSEE du chômage au sens du BIT (cf. ci-dessous). Le chômage de longue durée a amorcé sa décrue (-2,2 % sur les trois derniers mois) alors même qu’il n’avait cessé de croître depuis la fin de l’année 2008 et le chômage des seniors continue de s’infléchir légèrement (-0,2 % sur 3 mois). Notons toutefois que la montée en charge du plan de formation instauré par François Hollande au début de l’année explique en partie ces évolutions encourageantes. Ainsi, au cours des 3 derniers mois, le nombre de demandeurs d’emploi inscrits en catégorie D a crû de 10,1 %, soit près de 30 000 personnes supplémentaires, sous l’effet principalement des entrées dans les dispositifs de formation comptabilisées dans cette catégorie[1].

Focus : l’évolution du chômage au sens du BIT depuis un an

Le 18 août dernier, l’Insee publiait ses statistiques portant sur les chômeurs au sens du BIT pour le deuxième trimestre 2016. Durant ce trimestre, le taux de chômage a diminué de 0,3 point par rapport au trimestre précédent. La baisse du nombre de chômeurs au sens du BIT entamée au second semestre 2015 se confirme donc. Elle est cependant plus marquée du côté du BIT que de Pôle Emploi. Le nombre de chômeurs au sens du BIT a ainsi baissé de 133 000 personnes entre le deuxième trimestre 2015 et le deuxième trimestre 2016 (graphique 1). Dans le même temps, le nombre de DEFM inscrits en catégorie A à Pôle Emploi a diminué de seulement 27 000 personnes. Comment peut-on expliquer un tel écart ?

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Outre leurs différences méthodologiques (enquête Emploi pour le BIT et source administrative pour Pôle emploi), les deux sources statistiques diffèrent par leur définition du chômage. Pour être comptabilisé comme chômeur au sens du BIT, il faut remplir trois conditions : être sans emploi, disponible pour en occuper un et effectuer une recherche active d’emploi. La seule inscription à Pôle emploi n’est cependant pas suffisante pour remplir cette dernière condition puisque les inscrits en catégorie A[2] à Pôle Emploi qui n’ont pas effectué de recherche active ne sont pas comptabilisés comme chômeurs au sens du BIT. Le critère du BIT est donc plus restrictif. Historiquement, le nombre de chômeurs inscrits à Pôle emploi est plus élevé que celui calculé au sens du BIT pour les personnes âgées de 25 ans et plus[3].

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Dans un contexte de reprise des créations d’emplois et donc d’amélioration du marché du travail, un certain nombre de personnes auparavant inactives, souhaitant désormais travailler, s’inscrivent à Pôle emploi et sont comptabilisées en tant que demandeurs d’emploi dans la catégorie A. Du fait de leur désir déclaré de reprise d’emploi, elles ne sont plus comptabilisés comme inactives au sens du BIT mais comme chômeurs dès lors qu’elles remplissent toutes les conditions énoncées auparavant. Cependant, une partie de ces personnes n’est pas nécessairement immédiatement disponible pour travailler. Cela a pour conséquence une augmentation du « halo » du chômage composé en partie de personnes souhaitant travailler, recherchant activement un emploi, mais non disponibles rapidement. Sur un an, le « halo » du chômage a augmenté de 43 000 personnes. Cette hausse s’explique exclusivement par les personnes souhaitant travailler mais non disponibles pour travailler dans les deux semaines (+54 000) et ce pour diverses raisons : personne achevant ses études ou sa formation, garde des enfants, personne s’occupant d’une personne dépendante, … (tableau 2). Cette évolution du halo confirmerait donc l’amélioration des perspectives sur le marché du travail et ne peut être considéré uniquement comme un phénomène de découragement des chômeurs. De la même façon, l’analyse des motifs de la baisse observée du chômage BIT au deuxième trimestre 2016 laisse présager l’amorçage d’une boucle vertueuse.

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Depuis un an, la baisse du taux de chômage au sens du BIT n’est pas artificielle

Le taux de chômage peut baisser pour deux raisons : l’amélioration de l’emploi ou le découragement de certains chômeurs qui basculent alors dans l’inactivité. Les dernières statistiques du BIT confirment que la baisse de 0,5 point du taux de chômage depuis un an s’explique intégralement par l’amélioration de l’emploi et non par le découragement. D’ailleurs, l’amélioration de l’emploi s’est aussi traduite par une hausse du taux d’activité – qui mesure le pourcentage de personnes actives dans la population âgée de 15 à 64 ans –, les chômeurs auparavant découragés reprenant leur recherche d’emploi (tableau 3).

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Dans le détail, l’arrivée des jeunes sur le marché du travail se traduit par une hausse du chômage de 0,1 point pour cette catégorie, et ce malgré un emploi qui repart. En effet, l’accélération de la croissance n’est pas assez forte pour absorber l’ensemble des jeunes arrivants sur le marché du travail. Chez les seniors, le taux d’emploi continue toujours à augmenter (de 0,8 point) du fait du recul de l’âge de départ effectif à la retraite. Certes, le chômage au sens du BIT baisse chez les seniors, mais la hausse des inscriptions à Pôle Emploi dans cette classe d’âge (tableau 1) traduit certainement une modification dans leur comportement de recherche d’emploi : de plus en plus de seniors ne font plus acte de recherche d’emploi et sont désormais classés dans le «halo» du chômage.

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Le chômage en quelques chiffres

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[1] Cette catégorie comptabilise les demandeurs d’emploi non tenus de rechercher un emploi (en raison d’une formation, d’une maladie, …), sans emploi.

[2] Les inscrits en catégorie A n’ont exercé aucune activité, pas même réduite, à la différence des inscrits en catégories B et C.

[3] Les moins de 25 ans ont un intérêt moindre à s’inscrire à Pôle emploi car pour ouvrir un droit à indemnisation au titre du chômage et percevoir l’allocation d’aide au retour à l’emploi, il faut justifier de 122 jours d’affiliation ou de 610 heures de travail au cours des 28 mois qui précèdent la fin du contrat de travail (36 mois pour les 50 ans et plus).




Petite reprise après grande crise

par le Département Analyse et prévision

Ce texte résume les perspectives 2016-2017 pour l’économie mondiale et la zone euro. Cliquer ici pour consulter la version complète.

La croissance mondiale traverse à nouveau une zone de turbulences. Si la dynamique de croissance n’est pas remise en cause, elle est néanmoins révisée à la baisse pour 2016 et 2017, où elle devrait atteindre respectivement 2,9 et 3,1 %. Le ralentissement touche en premier lieu les pays émergents avec une baisse de la croissance chinoise qui se confirme et s’accentue (6,1 % anticipé pour 2017 contre plus de 7,6 % en moyenne sur 2012-2014). Le ralentissement de la demande chinoise pèse sur le commerce mondial et contribue à la faiblesse du prix du pétrole, ce qui accroît en retour les difficultés des pays producteurs de pétrole et de matières premières. Enfin, la perspective de normalisation de la politique monétaire américaine se traduit par un reflux des capitaux. Le dollar s’apprécie et les monnaies des pays émergents d’Asie et d’Amérique latine se déprécient. Si les pays industrialisés pâtissent également du ralentissement chinois par un effet de demande adressée, leur croissance reste soutenue grâce à la baisse du prix du pétrole. Le soutien de la politique monétaire s’atténue aux États-Unis mais s’amplifie dans la zone euro, ce qui maintient l’euro à un faible niveau. Quant aux politiques budgétaires, elles ne sont plus systématiquement restrictives. Dans ces conditions, la croissance ralentirait aux États-Unis, passant de 2,4 % en 2015 à 1,9 % puis 1,6 % en 2016-2017. La reprise s’accélérerait légèrement dans la zone euro, portée notamment par le dynamisme de l’Allemagne et de l’Espagne et l’amélioration des perspectives en France et en Italie. Sur l’ensemble de la zone euro, la croissance atteindrait 1,8 % en 2016 et 1,7 % en 2017. Cette dynamique permettra de réduire le taux de chômage ; mais, en fin d’année 2017, il serait néanmoins encore 2 points au-dessus de son niveau d’avant-crise (9,3 % contre 7,3 % en fin d’année 2007). Alors que le risque déflationniste semble écarté pour les États-Unis, il reste prégnant dans la zone euro. L’inflation est proche de zéro et le niveau très bas des anticipations d’inflation à long terme témoigne des difficultés de la BCE à reprendre le contrôle de l’inflation. La persistance du chômage indique que la politique de gestion de la demande en zone euro reste largement déficiente. De fait, elle repose entièrement sur la politique monétaire. Si les actions de la BCE sont une condition nécessaire à l’accélération de la croissance, elles ne sont pas suffisantes et doivent être complétées par des politiques budgétaires plus actives. Au niveau de l’ensemble de la zone euro, la politique budgétaire est en effet globalement neutre (expansionniste en Allemagne ou en Italie en 2016 mais restrictive en France et plus encore en Grèce) alors qu’elle devrait être plus expansionniste pour engager une baisse plus rapide du chômage et permettre d’écarter le risque déflationniste. Par ailleurs, cette situation de croissance modérée se traduit également par l’accumulation d’excédents courants de la zone euro (3,2 % en 2015). De fait, s’il y a bien eu une correction des déséquilibres intra-zone euro, elle s’explique surtout par l’ajustement des pays qui étaient en situation de déficit avant la crise. Dès lors, l’excédent de la balance courante de la zone euro fait peser des risques à terme sur le niveau de l’euro qui pourrait s’apprécier une fois que le stimulus monétaire prendra fin, freinant alors la croissance.

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Le chômage bâti pour durer

Département Analyse et Prévision (Équipe France)

Les chiffres du mois de février 2016 publiés par Pôle Emploi font apparaître une hausse de 38 400 du nombre de demandeurs d’emploi n’exerçant aucune activité (catégorie A). Si cette hausse est à première vue très forte, elle est à prendre avec prudence. Pour rappel, le nombre d’inscrits à Pôle Emploi avait reculé fortement en janvier du fait d’un changement des règles administratives de réinscription. Ainsi, une partie de la hausse s’explique par la normalisation du nombre de cessations d’inscription pour défaut d’actualisation qui s’établit désormais à 218 000 en février après avoir atteint 239 000 en janvier. Par rapport au mois de décembre 2015, où les changements administratifs ne brouillent pas le signal, le nombre de chômeurs inscrits dans la catégorie A a augmenté de 10 500 personnes.

En février, la hausse des inscrits en catégorie A reflète en grande partie le transfert des inscrits des catégories B (-3 000 en février) et C (-32 300) vers la catégorie A. Au total le nombre d’inscrits en catégories A, B, C augmente légèrement (+3 100) mais reste à un niveau inférieur de 15 200 à celui atteint au mois de décembre. La forte baisse des inscrits en catégorie C, regroupant les inscrits à Pôle Emploi en activité réduite longue (plus de 78 heures au cours du mois) constitue un signal négatif, à prendre avec prudence, sur le niveau de l’emploi du mois de février.

Ces évolutions mensuelles doivent être mises en regard des évolutions sur plus longue période. Après huit années de crise qui ont bouleversé l’emploi, les évolutions des demandeurs d’emploi par grands domaines professionnels permettent d’appréhender certaines dimensions de ces transformations. Ainsi, entre début 2008 et fin 2015, le nombre d’inscrits en catégorie A, B et C à Pôle Emploi a augmenté de 2,3 millions, celui des inscrits en catégories A de 1,5 million. Ces demandeurs d’emploi supplémentaires en catégorie A proviennent principalement du secteur des services (+ 1,1 million). Le nombre de demandeurs d’emplois issus des secteurs du BTP (bâtiments et travaux publics) et de l’industrie voient, quant à eux leur nombre augmenter respectivement de 200 000 et 170 000 sur cette même période. Rapportées au nombre de demandeurs d’emplois en catégorie A, ces évolutions montrent une hausse plus rapide des inscrits dans l’industrie et le BTP au début de la crise. Si cette hausse de la part des inscrits issus de l’industrie s’est avérée temporaire (+ 2 points entre début 2008 et début 2009, puis retour au niveau initial début 2011), elle apparaît bien plus durable dans le BTP (+2,2 points entre début 2008 et fin 2015). Depuis 2011, le nombre d’inscrits en catégorie A par grands domaines professionnels croît au même rythme.

 

G1_Chomage (1)

Parmi les 74 familles professionnelles répertoriées par la Dares, au sein desquelles nous avons retenu celles ayant un poids significatif[1], les dix qui ont connu la plus forte augmentation depuis début 2008 sont principalement dans le secteur du BTP. En effet, plus de la moitié des dix professions les plus impactées par le chômage se situent dans ce secteur avec une augmentation comprise entre 126 % pour les conducteurs d’engins du BTP et plus de 200 % pour les ouvriers qualifiés du gros œuvre du bâtiment. En dehors du BTP, les professions ayant connu la plus forte hausse du nombre d’inscrits à Pôle Emploi depuis début 2008 sont les métiers liés à la restauration et au commerce de bouche (148 % pour les cuisiniers et 130 % pour les bouchers, charcutiers, boulangers), ainsi que les aides à domicile et ménagères (+126 %) ou les professionnels de l’action culturelle, sportive et surveillants (+126 %). Ces dix familles professionnelles qui représentaient moins de 13 % des inscrits en catégorie A au début de l’année 2008 ont contribué à hauteur de près de 23 % à la hausse du chômage depuis le début de la crise.

G2_Chomage

 

 

[1] Leur famille représente au moins 0,5 % du nombre d’inscrits en catégorie A, ce qui correspond à plus de 15 000 inscrits en catégorie A pour une seule famille professionnelle.