iAGS, un rapport annuel indépendant

par Christophe Blot, Jérôme Creel et Xavier Timbeau

L’austérité budgétaire dans la zone euro est un échec retentissant. Après deux années successives de restrictions budgétaires, la zone euro se prépare à engager, en 2013, une nouvelle phase d’austérité. Sur la base d’un travail collectif ayant abouti à la publication du premier rapport iAGS 2013, les instituts économiques ECLM au Danemark, IMK en Allemagne et l’OFCE montrent que cette stratégie mène à une situation dramatique : la zone euro sera en récession en 2013, comme en 2012, et le chômage va continuer d’augmenter, pour atteindre près de 27 millions d’Européens résidant dans la zone euro à la fin 2013.

Cette situation n’est pas soutenable, socialement et économiquement, et elle ne l’est pas non plus du point de vue des finances publiques : les cures d’austérité ont des effets réels si néfastes que les déficits et les dettes publics ne peuvent pas durablement baisser. La stratégie européenne doit donc être discutée et une alternative proposée. Celle-ci consiste, en respectant les traités européens en vigueur, à atténuer dès 2013 l’effort d’austérité budgétaire : il faut passer d’une baisse programmée du déficit corrigé de la conjoncture de 1,4% du PIB pour l’ensemble de la zone euro à une baisse de 0,5% du PIB. Et en invoquant les circonstances exceptionnelles que traverse la zone euro – qui prétendra qu’une troisième année de récession anticipée, après celles déjà bien effectives de 2009 et 2012, n’est pas exceptionnelle ? -, il faudrait même décaler dans le temps les efforts d’ajustement. Le rapport iAGS montre que cette stratégie permettrait effectivement de converger vers un ratio de dette publique conforme aux traités européens et à l’horizon de 20 ans qu’imposent ces mêmes traités, tout en limitant considérablement les coûts sur l’emploi et la croissance.




Le chômage augmente en France, la pauvreté en Allemagne

Par Eric Heyer

La France sera-t-elle la nouvelle Grèce comme l’affirme l’hebdomadaire The Economist? Les réformes françaises doivent-elles s’accélérer et s’inspirer de celles menées il y a 10 ans outre-Rhin ?  Pour l’opinion publique allemande, pour ses autorités ainsi que pour une grande partie des experts économiques, cela ne fait aucun doute. Outre un déficit public plus faible, l’Allemagne aurait avant tout réussi à baisser significativement son taux de chômage contrairement à son voisin français. Parti d’un niveau similaire au début des années 2000 (proche des 7,7 % fin 2001), le taux de chômage se situe aujourd’hui à 5,4 % de la population active en Allemagne, soit 4,5 points de % de moins qu’en France (graphique 1).

L’objet de ce billet n’est pas de revenir sur les raisons de ce différentiel – qui ont par ailleurs déjà fait l’objet de notes sur ce blog (voir notamment l’impact de la démographie par G. Cornilleau, de la baisse de la durée du travail par E. Heyer et M. Plane et de la montée des inégalités hommes-femmes par H. Périvier)- mais simplement de signaler que cette baisse du chômage en Allemagne s’est accompagnée d’une forte augmentation de la pauvreté.

D’après Eurostat, au cours des six dernières années, le taux de pauvreté, mesuré au seuil de 60 % du revenu médian, aurait augmenté de 3,6 points de pourcentage en Allemagne, augmentation quatre fois plus importante que celle observée en France (0,9 point). En 2011, malgré la forte baisse du chômage et un différentiel important avec la France, le taux de pauvreté en Allemagne se situerait à 1,8 point au-dessus – soit plus de 11 % de plus – de celui observé en France (graphiques 2 & 3).

 

 

 

Il existe donc bien une face cachée des réformes menées en Allemagne depuis plus de dix ans qui a conduit vers moins de chômage mais plus de pauvreté.