Le casse-tête budgétaire américain

Par Christine Rifflart

Avant le 13 décembre prochain, le Budget Conference Committee doit présenter les résultats de ses discussions lancées à la suite du shutdown et de la crise de la dette du mois d’octobre 2013. L’objectif des négociations : permettre le vote du Budget 2014 au Congrès, dont l’année fiscale a démarré le 1er octobre dernier[1] et trouver une alternative aux coupes automatiques dans les dépenses du gouvernement fédéral qui devraient s’appliquer au 1er janvier 2014. Un accord ne semble pas hors d’atteinte. Même si l’opposition entre républicains et démocrates reste vive, la raison devrait l’emporter et le risque d’une nouvelle crise budgétaire semble exclu. Au pire, une nouvelle Continuing Resolution[2] sera votée permettant le fonctionnement des institutions et laissant l’arbitraire des coupes budgétaires automatiques dans les dépenses structurelles conduire la politique du gouvernement. Au mieux, les négociations aboutiront à des coupes raisonnées sur ces dépenses, voire à des hausses de certaines recettes qui assoupliront alors la violence de l’ajustement, violence amplifiée par l’arrivée à terme de mesures exceptionnelles de soutien aux revenus et à l’activité prises au cœur de la crise.

Les marges de négociations sont étroites. Sur l’année fiscale 2013, le déficit de l’ensemble du secteur public atteint 7 % du PIB – après 12,8 % sur l’année fiscale 2009, et le déficit du gouvernement fédéral affiche 4,1 % du PIB – après 9,8 %. La dette fédérale représente actuellement 72,7 % du PIB et continue d’augmenter. Par ailleurs, la croissance reste faible : 2,2 % en moyenne annuelle depuis la reprise de 2010 et 1,8 % attendu en 2013, et surtout insuffisante pour redynamiser le marché de l’emploi. Dès lors, comment mener une politique budgétaire de soutien à la croissance sur fond de rigueur budgétaire, de réduction des déficits et surtout de respect des engagements antérieurement actés par le Congrès[3],notamment du Budget Control Act of 2011 ? A la suite de la crise du plafond de la dette fédérale en juillet 2011, le président Obama signait le 2 août 2011 le Budget Control Act of 2011 qui conditionnait le relèvement du plafond de la dette fédérale à une réduction massive des dépenses publiques sur 10 ans. En plus de l’introduction de plafonds sur les dépenses discrétionnaires[4], 1200 milliards de dollars de coupes automatiques (sequestrations) dans les dépenses ont été prévus sur la période 2013-2021 selon un principe de parité entre les budgets de la défense et hors défense. Ont été exemptés un certain nombre de programmes sociaux (assurance vieillesse, programme Medicaid, garanties de revenu…) tandis que les coupes du programme Medicare, destiné aux personnes âgées, ont été limitées à 2 %. Au total, les coupes s’appliquent sur un peu moins de la moitié des dépenses du gouvernement fédéral et représentent 109 milliards par an d’économies réalisées sur le déficit, soit 0,6 % du PIB.

Sur l’année fiscale 2014, selon le CBO, la combinaison de ces deux mesures (dépenses discrétionnaires plafonnées et coupes automatiques dans les budgets non protégés) ainsi que la reconduction du montant des crédits de 2013 à 2014 (donc un budget constant en nominal), conduisent à des coupes dans les dépenses discrétionnaires de 20 milliards de dollars qui devront être intégralement supportées par le Pentagone. Sur cette base, si les coupes sont maintenues, les dépenses discrétionnaires des budgets de la défense et hors défense auront baissé respectivement de 17 % et 17,8%, en termes réels entre 2010 et 2014.

Mais en plus de ces coupes brutales, d’autres programmes, dont ceux principalement destinés aux ménages à bas revenus, vont connaître en 2014 une réduction de leur budget du fait de l’arrivée à échéance des mesures exceptionnelles dont ils bénéficiaient jusqu’alors. Ainsi, le programme d’extension de l’allocation chômage créé le 30 juin 2008 pour les chômeurs ayant épuisé leurs droits (Emergency Unemployment Compensation) se termine au 1er janvier 2014. Cet arrêt devrait frapper 4 millions de personnes si rien n’est envisagé.

C’est également le cas du programme SNAP (Supplemental Nutrition Assistance Program) qui avait bénéficié dans le cadre de l’American Recovery and Reinvestment Act de 2009 de ressources supplémentaires qui se sont éteintes au 1er novembre dernier. Or,47,7 millions de bénéficiaires (soit 15 % de la population) ont reçu des bons alimentaires cette année. Selon le CBPP, cette baisse de 7 % des ressources du programme devrait se traduire par un recul de 4 millions du nombre de bénéficiaires.

Autre exemple, le programme des aides au logement pour les 2,1 millions de familles qui ne peuvent se loger dignement devrait être affecté lui aussi par l’arrivée à échéance des rallonges budgétaires instituées en 2009 et les coupes automatiques. Si les budgets ne sont pas reconduits, entre 125 000 à 185 000 des familles bénéficiaires à la fin 2012 ne percevront plus les aides à la fin 2014.

Selon les informations actuellement disponibles, un accorda minima du Budget Conference Committee semble se dessiner. Les coupes dans le budget de la défense pourraient être validées[5] tandis que d’éventuelles hausses de redevances de services publics permettraient de financer des rallonges budgétaires pour certains programmes sociaux, et d’alléger l’impact des coupes automatiques. En avril dernier, le Président Obama avait présenté devant le Congrès son Projet de Budget 2014. Il proposait à l’époque de supprimer les procédures de coupes automatiques, de réduire à long terme la dette par une vaste réforme budgétaire, et à plus court terme, de différer une partie des restrictions budgétaires 2014 sur les années fiscales 2015 et 2016 afin de soutenir la croissance. L’accord qui sera vraisemblablement présenté au Congrès d’ici le 13 décembre ne devrait pas avoir cette ambition. Face aux républicains (majoritaires à la Chambre des représentants) partisans d’économies supplémentaires, les démocrates (majoritaires au Sénat) vont avoir du mal à défendre une hausse des dépenses publiques en 2014 et empêcher que la politique budgétaire soit aussi pénalisante pour la croissance cette année qu’elle ne l’a été en 2013.

 


[1] A défaut d’avoir été adopté par le Congrès, le budget 2014 est depuis le 16 octobre financé par une Continuing Resolution (voir note 2) sur la base des montants du budget 2013.La résolution agit rétroactivement à partir du 1er jour de l’année fiscale 2014, soit le 1er octobre 2013, et jusqu’au 15 janvier 2014.

[2] Une Continuing Resolution est une résolution provisoire adoptée par le Congrès qui permet de reconduire les crédits alloués l’année fiscale précédente à l’année fiscale en cours, en attendant que soient votés les nouveaux crédits.

[3] Selon le CBPP, si l’on considère l’ensemble des mesures de réduction du déficit prises depuis 2010 dans le Budget 2011, le Budget Control Act of 2011 et l’American Taxpayer Relief Act de 2012, l’impact cumulé sur le déficit serait de 4000 milliards sur la période 2014-2023, soit l’équivalent de 24 % du PIB de 2013.

[4] Les dépenses discrétionnaires (33 % des dépenses fédérales) sont les dépenses dont les budgets sont votés sur une base annuelle à la différence des dépenses obligatoires (61 %) qui sont assises sur des programmes faisant l’objet d’une loi antérieure. La politique budgétaire du gouvernement, côté dépenses, est principalement assise sur l’évolution des dépenses discrétionnaires, qui sont des dépenses structurelles.

[5] Les dépenses liées à la défense ont déjà baissé de 13,1 % en termes réels, entre le troisième trimestre 2010 et le troisième trimestre 2013.




Shut down : l’Amérique sur la sellette

par Christine Rifflart

Un Etat qui demande à plus d’un tiers de ses fonctionnaires de rester chez eux parce qu’il ne peut plus les payer est dans une situation critique. Quand il s’agit des Etats-Unis, c’est le monde entier qui s’inquiète.

L’absence d’un accord sur le budget 2014, dont l’exercice légal a débuté mardi 1er octobre 2013, illustre le bras de fer au Congrès entre démocrates et républicains. Ces tensions budgétaires ne sont pas nouvelles : aucun budget n’a été voté depuis 2011 et l’administration fédérale a fonctionné jusqu’alors à coup de continuing resolutions qui permettent de débloquer, de façon provisoire, les financements nécessaires à son fonctionnement et à ses opérations. Aujourd’hui, le blocage est d’une autre ampleur et une partie de l’administration doit fermer ses portes, faute de financement. Cette situation exceptionnelle n’est pas inédite : 17 shut downs ont eu lieu depuis 1976, les deux derniers sous l’administration Clinton avaient duré respectivement une semaine (du 13 au 18 novembre 1995) et trois semaines (du 15 décembre 1995 au 6 janvier 1996).

Selon l’Office of Management and Budget, sur les 2,1 millions de salariés du gouvernement fédéral, plus de 800 000 sont interdits de service pendant que d’autres doivent venir travailler, sans garantie d’être payés. Par exemple, sont concernés par l’interdiction de travailler 97 % des salariés de la NASA, 93 % de l’agence de protection de l’environnement, 87 % du Ministère du Commerce, 90 % des services des impôts… Chacun d’eux a pu recevoir une lettre du Président disant son amertume. Concrètement, cela signifie aussi qu’une partie des services sociaux n’est plus assurée, les plateformes téléphoniques des administrations sont fermées, les monuments et les 368 parcs nationaux ne sont plus ouverts au public, les nouvelles demandes de prêts subventionnés, d’aides au logement, de garanties de prêts ne sont plus examinées, les services du gouvernement sont fermés :

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Sont épargnés néanmoins les services vitaux et les programmes dont le financement n’est pas lié au vote du budget annuel (mandatory spending) qui comptent pour plus de 60 % des dépenses hors charges d’intérêt et représentent 12,7 % du PIB. Certains programmes de sécurité sociale (Medicare, Medicaid), le service postal, la sécurité nationale, les opérations militaires sont ainsi protégés du shut down, dans la limite néanmoins où ceux-ci ne sont pas affectés par les restrictions de leur personnel  dont les salaires sont pris sur le budget 2014.

Une autre crise politico-budgétaire se profile : le gouvernement pourrait être mis en défaut de paiement à partir du 17 octobre si le plafond de la dette autorisé n’est pas relevé.  Cette situation d’attentisme attise la nervosité des marchés financiers et la dureté du climat politique au sein du Congrès ne laisse pas présager d’une fin honorable dans ce que les médias qualifient de chicken game[1]. En 1995, pourtant, Clinton était sorti vainqueur de cette crise contre les républicains et avait été réélu en 1996, malgré la majorité des républicains au Congrès.

En attendant la sortie de crise, l’économie pourrait être durement touchée. En cas de non-paiement des salaires et traitements des fonctionnaires fédéraux, le manque à gagner serait en moyenne de plus de 1 500 dollars par semaine pour chaque famille concernée. Pour l’ensemble des 2,1 millions de fonctionnaires fédéraux, cela représente 0,08 % du PIB trimestriel. Sur trois semaines, cela fait 0,25 % du PIB de revenus en moins dans l’économie au quatrième trimestre. Le Congrès pourrait cependant voter le paiement rétroactif des salaires. C’est ce qui a été généralement exécuté lors des précédents shut downs.

Mais surtout, cela est sans compter la désorganisation de l’économie. En considérant sur une base annuelle que la moitié des dépenses discrétionnaires du gouvernement fédéral (soit 37 % des dépenses fédérales ou 7,6 % du PIB)[2] est  affectée par le blocage car financée sur le budget 2014, ce manque à dépenser représente 0,15 point de PIB par semaine. Compte tenu de la désorganisation impliquée par la fermeture des administrations (on applique un multiplicateur budgétaire de 1,5), l’effet sur la croissance pourrait alors avoisiner au moins 0,22 point de PIB par semaine. Si la crise dure 3 semaines, l’impact sur le PIB du quatrième trimestre serait d’au moins 0,7 point de PIB. De quoi faire passer l’économe américaine en récession à la fin de l’année !

D’autres estimations existent. L’Office of Management and Budget avait évalué le coût des shut downs de 1995 (du 13 au 18 novembre 1995 puis du 15 décembre au 6 janvier 1996) à 1,4 milliard de dollars d’alors (soit 0,5 % du PIB trimestriel). Sur la base des shut downs de 1995, Goldman Sachs évalue à 8 milliards de dollars le coût hebdomadaire pour l’économie américaine, soit un impact de 0,2 % sur le PIB du quatrième trimestre. L’agence Moody’s Analytic Inc. estime un impact de 0,35 % point de PIB trimestriel par semaine de shut down.

Si la crise budgétaire ne dure que quelques jours, les répercussions sur l’économie française seront minimes : on évalue à 0,17 % la baisse de la croissance française si la croissance américaine se réduit d’1 %. Mais si le blocage dure plusieurs semaines et se superpose à la crise sur le plafond de la dette publique dont la date butoir est proche, les conséquences pourraient alors être tout autres.  Les deux crises (blocage budgétaire et défaut de paiement de la dette publique) se combineraient et s’alimenteraient l’une l’autre, comme le souligne ce post du New York Times. On imagine à peine la panique sur les marchés financiers, la hausse des taux d’intérêt qui en résulterait et la dégringolade du dollar. Ce serait alors une toute autre histoire…

 


[1] Dans la théorie des jeux, le chicken game (ou jeu de la poule mouillée) est un jeu d’influence entre deux joueurs dans lequel aucun ne doit céder. Ainsi, dans le cas d’une course automobile frontale, la poule mouillée est le conducteur  qui sort de sa trajectoire pour éviter la mort due à la collision des deux voitures.

[2] Une grande partie des dépenses du Ministère de la Défense sont votées sur une base pluri-annuelle et ne sont pas soumises à restriction du fait de ce blocage. Or, les dépenses du Ministère de la Défense comptent pour plus de la moitié de ces dépenses discrétionnaires. Par ailleurs, les autres dépenses (mandatory outlays) ne sont pas financées sur des crédits soumis au vote du Budget.




2013 : quel impact des mesures budgétaires (nationales) sur la croissance ?

par Mathieu Plane

Ce texte complète les prévisions pour l’économie française d’octobre 2012 de l’OFCE

Après avoir détaillé les effets multiplicateurs attendus pour les différents instruments de la politique budgétaire, le multiplicateur budgétaire interne moyen associé à la politique d’austérité menée en France en 2013 serait de 0,9. Cette politique amputerait le PIB de 1,7 % pour cette seule année.Après un effort budgétaire cumulé de 66 milliards d’euros en 2011 et 2012, les économies structurelles attendues pour 2013 représentent environ 36 milliards d’euros (1,8 point de PIB) si l’on intègre à la fois les mesures prises dans le cadre du Projet de loi de finances pour 2013 et les différentes mesures décidées précédemment (tableau). Le choc budgétaire résultant du PLF pour 2013 serait de 28 milliards d’euros, dont 20 uniquement sur les taux de prélèvements obligatoires (PO). Parmi les 8 milliards d’euros restant, près de 5 milliards de hausse de PO sont issus de la seconde Loi de finances rectificative de l’été 2012, le reste étant principalement dû à la première Loi de finances rectificative pour 2012 et à la hausse des cotisations qui résulte de la révision de la réforme des retraites de l’été 2012.

Au total, l’effort budgétaire pour 2013 se décompose entre une hausse de prélèvements obligatoires pour environ 28 milliards d’euros (1,4 point de PIB)  et une économie structurelle sur la dépense publique primaire de 8 milliards (0,4 point de PIB). La hausse de la pression fiscale et sociale représenterait près de 16 milliards pour les ménages et plus de 12 milliards pour les entreprises. Cette répartition ne tient pas compte des mesures de compétitivité annoncées le 6 novembre par le premier ministre. Les crédits d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) n’auraient pas d’effet budgétaire en 2013 à l’exception près de la possible mise en place dès 2013 d’une avance, pour certaines entreprises en mal de trésorerie, sur leur futur crédit d’impôt.

A partir des variantes de multiplicateur budgétaire, réalisées avec e-mod.fr selon la position de l’économie dans le cycle, pour les principaux prélèvements fiscaux et sociaux ainsi que les principales composantes de la dépense publique[1] et des différentes évaluations que nous avons pu mener, notamment dans le cadre de l’évaluation du programme économique du quinquennat, nous avons appliqué un multiplicateur budgétaire spécifique à chaque mesure  pour 2013 (tableau). Les multiplicateurs à court terme ne prennent en compte que les effets directs des mesures sur l’activité domestique, indépendamment des politiques budgétaires de nos partenaires commerciaux qui amplifient l’impact de la politique nationale. On suppose par ailleurs que la politique monétaire n’est pas modifiée. Les valeurs à long terme des multiplicateurs sont différentes de celles de court terme et moins élevées sauf à conserver durablement un écart de production négatif.

Sur les 16 milliards d’augmentation de PO sur les ménages en 2013, la hausse discrétionnaire de l’IRPP serait de 6,4 milliards dont 3,2 issus de la Loi de finances pour 2013 (contre 4 dans le PLF car la proposition d’imposition au barème des plus-values mobilières sera largement amendée et le rendement de la mesure pourrait baisser d’environ 0,8 milliard, le manque à gagner pouvant être compensé par le prolongement de la contribution exceptionnelle de 5 % d’IS pour les très grandes entreprises), le reste provenant de la Loi de finances rectificative pour 2012 (dont 1,7 milliard uniquement avec la désindexation du barème de l’IRPP). Si la hausse de l’IRPP liée au PLF 2013 est ciblée sur les hauts revenus, sa contribution (3,2 milliards) représente seulement 11 % de la hausse des PO (20 % si l’on se limite aux seuls ménages) en 2013 et moins de 9 % de l’effort budgétaire total.  Selon nos calculs, le multiplicateur budgétaire moyen lié aux différentes mesures de hausse de l’IRPP serait de 0,7 en 2013.

L’augmentation des PO des ménages proviendrait principalement de la hausse des prélèvements sociaux et des cotisations sociales (8,7 milliards d’euros) prévue dans le Projet loi de finances de la Sécurité sociale pour 2013 (2,9 milliards) et les mesures de la Loi de finances rectificative pour 2013 (5,3 milliards qui incluent la remise en cause de la défiscalisation des heures supplémentaires, la limitation des niches sociales, de l’épargne salariale, la hausse de la CSG sur les revenus du capital, …) et la réforme des retraites avec une hausse du taux de cotisation (0,5 milliard). Le multiplicateur budgétaire moyen lié à ces différentes mesures serait de 0,9. Enfin la réforme des droits de succession augmenterait les PO de 1,1 milliard. En revanche, les recettes de l’ISF, en 2013, seraient inférieures de 1,3 milliard par rapport à celles de 2012. En effet, la contribution exceptionnelle sur la fortune qui avait été mise en place dans le cadre de la Loi de finances rectificative pour 2012 a un  rendement supérieur à celui issu de la nouvelle réforme pour 2013. Le multiplicateur budgétaire pour ces deux mesures est de 0,3.

Au total, selon nos calculs, la hausse des prélèvements sur les ménages en 2013 aurait en moyenne un effet multiplicateur de 0,8 et amputerait la croissance de 0,6 point de PIB.

Pour les entreprises, les mesures prises passent principalement par la hausse de l’impôt sur les sociétés prévue dans le PLF 2013 (8 milliards d’euros dont 4 milliards liés à la réforme de la déductibilité des charges financières). Le multiplicateur moyen de la hausse de l’IS est estimé à 0,7 en 2013. 2,3 milliards d’euros proviennent d’une hausse des cotisations sociales et des prélèvements sociaux avec un multiplicateur budgétaire unitaire. Enfin d’autres mesures, comme les mesures sectorielles sur la fiscalité des assurances ou la contribution exceptionnelle du secteur pétrolier, viendront augmenter la pression fiscale des entreprises de 1,9 milliard en 2013 et le multiplicateur budgétaire moyen est évalué à 0,5.

Selon notre évaluation, la hausse des PO sur les entreprises aurait en moyenne un effet multiplicateur de 0,8 et réduirait le PIB de 0,5 point de PIB en 2013.

Par ailleurs, le multiplicateur budgétaire à court terme associé à la dépense publique, dans une phase de bas de cycle, est, selon notre modèle, de 1,3 ; il est donc supérieur à celui qui est associé aux prélèvements. Ce résultat est conforme aux résultats de la littérature empirique la plus récente (pour plus de détails, voir encadré « Multiplicateurs budgétaires : la taille compte ! ». La perte d’activité estimée résultant de la restriction sur la dépense publique serait de 0,5 point de PIB en 2013.

Au total, le multiplicateur budgétaire interne moyen associé à la politique d’austérité menée en France en 2013 serait de 0,9 et cette politique amputerait le PIB de 1,7 %. Ce résultat est dans la fourchette basse des derniers travaux du FMI qui estime, à partir des données récentes sur 28 pays, que les multiplicateurs réels pourraient s’échelonner de 0,9 à 1,7 depuis le début de la Grande Récession.


[1] Pour plus de détails, voir Creel, Heyer, Plane, 2011, « Petit précis de politique budgétaire par tous les temps », Revue de l’OFCE, n° 116, janvier 2011.