Chômage : ça va (un peu) mieux

Département Analyse et prévision (Equipe France)

Les chiffres du chômage du mois d’avril 2016 publiés par Pôle Emploi font apparaître, après la baisse exceptionnelle enregistrée au mois de mars (–60000), une nouvelle baisse du nombre de demandeurs d’emploi n’exerçant aucune activité (catégorie A) de 19 900 personnes en France métropolitaine[1]. Ces deux mois de baisse consécutifs interviennent après une séquence d’alternance de baisses et de hausses mensuelles depuis le mois d’août 2015. Les statistiques mensuelles des demandeurs d’emplois sont habituellement volatiles, mais il n’en reste pas moins que l’inflexion de la trajectoire est perceptible. En 3 mois cette baisse est de 41 500. Elle se monte à 22 500 sur un an, soit la première baisse observée depuis le mois de septembre 2008, mois de la faillite de la banque Lehman Brothers (cf. graphique).

 

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La baisse importante du nombre de demandeurs d’emploi inscrits depuis plus d’un an (–11 900 sur trois mois), ainsi que celle du nombre de demandeurs d’emploi de plus de 50 ans (-3 100 sur 3 mois) sont autant de signes positifs de l’amélioration en cours sur le marché du travail. Là encore, de telles baisses n’ont pas été observées depuis 2008 pour ces publics les plus éloignés de l’emploi.

Ces évolutions sont la suite logique de l’accélération de la croissance de l’économie française observée depuis l’année 2015 (+1,2% en moyenne annuelle en 2015) et de la montée en puissance des politiques de baisse du coût du travail (CICE et Pacte de responsabilité et prime à l’embauche). Cette année-là a ainsi vu une accélération des créations d’emplois totales tirée par le secteur marchand (+122 000), avec en parallèle un moindre dynamisme des créations d’emplois aidés dans le secteur non-marchand. De fait, contrairement aux années précédentes, les créations d’emplois ne sont plus soutenues par les contrats aidés dans le secteur non-marchand.

Perspectives : la baisse devrait s’amplifier

Cette dynamique positive devrait se poursuivre en 2016 et 2017, années pour lesquelles nous prévoyons une croissance de 1,6% de l’activité. Ce retour de la croissance permettrait une accélération des créations d’emplois dans le secteur marchand (177 000 en 2016 et 134 000 en 2017 en glissement annuel). De plus, la montée en charge du plan de formations[2] dans les prochains mois devrait renforcer la baisse du chômage observée depuis la fin de l’année 2015 [3]. Ainsi, le taux de chômage au sens du BIT devrait baisser de 0,5 point en deux ans, pour atteindre 9,5% de la population active fin 2017 et la baisse des inscrits en catégorie A devrait se poursuivre.

Ce rythme d’amélioration restera toutefois insuffisant pour effacer rapidement les stigmates de la crise. Rappelons qu’en 2008, le taux de chômage au sens du BIT s’élevait en France métropolitaine à 7,1%. Au rythme actuel, Il faudrait encore une dizaine d’années pour retrouver le niveau de chômage d’avant-crise.

 

[1] Cette baisse est toutefois marquée par une hausse anormale des cessations d’inscription pour défaut d’actualisation (+50 700 par rapport à la moyenne observée sur les trois premiers mois de l’année), qui semblerait concerner principalement les demandeurs d’emploi inscrits en catégories B et C. Cela n’invaliderait donc pas la baisse observée des inscrits en catégorie A.

[2] Le gouvernement a annoncé 500 000 formations supplémentaires pour 2016 dans le cadre du Plan d’urgence pour l’emploi

[3] La hausse du nombre de demandeurs d’emploi en formation devrait se traduire par un transfert essentiellement des demandeurs d’emploi de la catégorie A (demandeurs d’emploi tenus de rechercher un emploi, sans emploi) vers la catégorie D (demandeurs d’emploi non tenus de rechercher un emploi (en raison d’une formation, d’une maladie…) y compris les demandeurs d’emploi en contrat de sécurisation professionnelle (CSP), sans emploi).




Chômage : baisse incertaine mais hausse certaine des inscrits de longue durée

Département Analyse et Prévision (Équipe France)

Les chiffres du chômage du mois de janvier 2016 publiés par Pôle Emploi font apparaître, après la hausse enregistrée au mois décembre (+15 800), une baisse du nombre de demandeurs d’emploi n’exerçant aucune activité (catégorie A) de 27 900 personnes. Si ce chiffre semble encourageant (une baisse d’une telle ampleur n’a pas été observée depuis 2007), il est à relativiser. D’une part, le changement de pratique administrative opéré par Pôle Emploi[1] s’est traduit par une augmentation anormale des sorties pour défaut d’actualisation (239 000 contre 207 000 en moyenne mensuelle en 2015). D’autre part, la forte volatilité des chiffres mensuels au cours des derniers mois est le signe d’un marché du travail dans lequel les créations d’emplois ne sont pas suffisantes pour faire baisser durablement le chômage.

Il est vrai que la hausse du nombre des sorties de Pôle Emploi pour motif de reprise d’emploi déclaré (+5,1% sur trois mois) constitue un signe positif laissant penser que la reprise attendue est en marche. Malgré tout, si des reprises d’emploi ont bien eu lieu, elles n’ont pas permis d’enrayer la montée continue du nombre de demandeurs d’emploi de longue durée (+9,1% en un an). Ainsi, dans un contexte de croissance quasi-nulle en moyenne depuis 2008 et une dégradation continue du marché du travail,  la part des inscrits depuis un an et plus en catégories A, B, C est en augmentation depuis la mi-2009 (31 % environ), et atteint un niveau historique, représentant 45,4 % de l’ensemble des inscrits en catégories A, B, C (graphique 1). Cette hausse s’explique notamment par la montée du chômage des seniors (+8,9 % sur un an) : la montée en charge des réformes de retraite successives (2003, 2010), couplée à la suppression des dispenses de recherche d’emploi pour les seniors, a conduit à un allongement de la durée d’activité et à un recul de l’âge légal de départ à la retraite. Dans un contexte de faible croissance, la hausse du taux d’emploi des seniors a été insuffisante pour absorber la dynamique de population active de cette classe d’âge, avec pour conséquence une hausse du chômage des plus de 50 ans (voir La suppression de la Dispense de recherche d’emploi : quand les gouvernements augmentent volontairement le décompte des chômeurs !).

La relative amélioration du marché du travail attendue dans les mois qui viennent trouverait sa source dans une légère amélioration de la croissance et la montée en charge du plan de formation des chômeurs annoncé par F. Hollande fin décembre 2015. Néanmoins, cette amélioration se diffusera lentement aux demandeurs d’emploi de longue durée. En effet, la transmission aux demandeurs d’emploi de longue durée de la baisse du nombre d’inscrits en catégorie A est relativement longue (graphique 2). Lors de la baisse importante du nombre d’inscrits observée à la fin des années 2000, il avait fallu attendre près d’un an et demi pour que la baisse enregistrée des inscrits en catégorie A se traduise par une baisse significative du nombre de demandeurs d’emploi de longue durée. Les mécanismes de reprise d’emploi sont ainsi sujets à une inertie importante.

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   Légende : DEFM : Demandeurs d’emploi en fin de mois.

[1] Du fait de ce changement méthodologique, les demandeurs d’emploi ont eu un jour de moins pour effectuer leur actualisation, entraînant de fait une augmentation importante du nombre de radiations pour cause de défaut d’actualisation (+1,5 sur trois mois).