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Bruno Coquet, Eric Heyer
La productivité du travail en France a traversé un long passage à vide entre la crise sanitaire et la fin 2022. Elle s’est ensuite redressée, progressant au rythme annuel de+1,3 % depuis le début de 2023 dans le secteur marchand non- agricole, soit plus rapidement que sa tendance de long terme (+0,9 % par an) ne comble cependant pas le retard accumulé au cours des trois années précédentes : la productivité par tête n’a pas encore tout à fait rejoint le niveau qui était le sien fin 2019, et elle demeure 5 % en dessous de sa trajectoire tendancielle.
Cette singularité française a fait l’objet de nombreuses conjectures. Celles-ci tenaient en partie aux données disponibles fin 2023 qui décrivaient une productivité déclinante, mais qui révisées et complétées distinguent désormais clairement l’affaissement de la productivité en sortie de crise sanitaire du regain ultérieur.
Nous revenons sur cette séquence afin de mieux en comprendre les ressorts. La politique de soutien à l’apprentissage apparaît comme le principal déterminant de l’affaiblissement de la productivité, puisque qu’elle explique actuellement près de 30 % de l’écart à la tendance antérieure, suivie par la politique de soutien aux entreprises (17 %) et la baisse du coût du travail principalement liée au retard d’indexation des salaires aux prix (13 %) ; la baisse du chômage et ce qu’elle emporte en termes de profil des actifs (9 %) et la contraction persistante de la durée du travail (6 %) jouent également un rôle significatif. Au total nous parvenons à expliquer 75 % de l’écart de productivité accumulé depuis 2019 par rapport à la tendance de long terme.
L’usage est de mesurer la productivité du travail en attribuant l’ensemble de la valeur ajoutée marchande aux seuls salariés, comme si les non-salariés n’en avaient aucune. Mais la part de ces derniers s’accroît vigoureusement depuis 20 ans, et leurs caractéristiques se transforment (revenu, durée du travail, etc.). L’incorporation des non-salariés dans nos équations n’améliore cependant pas la qualité de celles-ci et modifie peu la hiérarchie des différentes variables identifiées dans notre modèle de base.
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