Comment peut-on défendre un revenu de base ?

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par Guillaume Allègre

A la suite de la remise de 125 000 signatures réunies par des organisations défendant l’introduction d’un revenu de base, les citoyens suisses se prononceront lors d’un référendum d’initiative populaire sur l’inscription du principe du revenu de base dans la constitution fédérale helvétique.

La Note de l’OFCE (n°39 du 19 décembre 2013) analyse des fondements sur lesquels pourrait s’appuyer l’institution d’un revenu de base.

Si le revenu de base peut prendre plusieurs formes, son principe est d’être versé (1) de manière universelle, d’un montant égal pour tous, sans contrôle des ressources ou des besoins ; (2) sur une base individuelle et non aux foyers ou ménages ; (3) de façon inconditionnelle, sans exigence de contrepartie. Dans sa version progressiste, on peut rajouter une quatrième caractéristique : il doit être (4) d’un montant suffisant pour couvrir les besoins de base et permettre la participation à la vie sociale.

Bien qu’en apparence séduisant, il n’est pas aisé de trouver des fondements, en matière de justice distributive, compatibles avec ces quatre caractéristiques du revenu de base. Tant qu’il existe des économies d’échelle et un arbitrage politique entre conditionnalité et niveau du revenu minimum, alors, dans une perspective rawlsienne, un système de revenu minimum garanti de type RMI/RSA (familialisé et faiblement conditionné) semble préférable à un revenu de base pur. De plus, la réduction généralisée du temps de travail semble une solution politique plus soutenable que le revenu de base pour atteindre les objectifs écologiques et émancipateurs qui sont souvent assignés au revenu de base.

Il apparaît que l’avantage principal du revenu de base, de par son universalité, est de ne provoquer aucun indu ou non-recours et de ne pas stigmatiser les bénéficiaires nets du système. Dans cette optique, les minima sociaux pourraient être transformés en une allocation plus universelle, qui serait moins stigmatisante. Cette allocation devrait tenir compte de la composition familiale, définir une condition de participation sociale. Elle impliquerait un contrôle du travail au noir et conserverait les incitations au travail. Elle serait complétée par des politiques spécifiques prenant en charge les enfants, les personnes âgées et les handicapés, soit ceux qui ne répondent pas aux incitations, et s’ajouterait au système assurantiel (chômage, retraite, maladie). Le système de protection sociale ne serait ainsi pas réellement simplifié mais transformé pour éviter la stigmatisation et le non-recours.

Si le revenu de base n’est pas une idée stupide, ce n’est pas non plus la réforme miracle décrite par ses défenseurs : véritable couteau suisse – social, écologiste, émancipateur – de la réforme de la protection sociale.

Pour en savoir plus: Note de l’OFCE n°39 (pdf)

Pour contacter l’auteur : guillaume.allegre@sciencespo.fr

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