Notre système de santé est-il en péril ? Le financement de l’assurance maladie et la crise (1/4)

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par Gérard Cornilleau

La santé fait partie des préoccupations essentielles des Français.  Pourtant sa place dans le débat politique reste limitée, sans doute du fait du caractère très technique des problèmes que posent le financement et la gestion du système de soins.  Une note de l’Ofce présente les quatre problèmes qui nous semblent essentiels dans le contexte actuel de crise économique générale : le premier concerne la financement de l’assurance maladie qui est mis à mal par l’affaiblissement des recettes liée à la crise ; le second concerne l’accès aux soins qui pourrait devenir plus compliqué du fait de la réduction temporaire du nombre de médecins ; le troisième est lié à l’évolution mal maîtrisée du partage des remboursements par la Sécurité sociale et les organismes complémentaires dans un contexte de croissance des dépenses non remboursées (notamment celles liées à la progression des dépassements d’honoraires) ; enfin le quatrième problème saillant concerne la gestion hospitalière qui a été fortement déstabilisée par l’introduction de la tarification à l’activité.

Le financement de l’assurance maladie : une nouvelle source à explorer

La crise a contribué à accentuer les difficultés de financement de l’assurance maladie, ce qui nourrit une inquiétude à propos de la pérennité du système de santé et de la prise en charge publique des dépenses de soins. Toutefois, l’analyse des grandes tendances des dépenses et du financement montre que dans l’hypothèse d’un retour à une situation macroéconomique « normale » les difficultés financières devraient être contenues et l’effort structurel à fournir pour équilibrer le régime relativement limité : le déficit de départ est relativement faible (environ 0,6 point de Pib de déficit total qui se partage à peu près en deux moitiés égales à 0,3 point de déficit structurel et 0,3 point de déficit conjoncturel), et les perspectives de croissance des dépenses à court-moyen terme restent modérées (avec une hausse du ratio dépenses / Pib de l’ordre de 0,1 point de Pib par an). Une augmentation de la CSG et des efforts réalistes de maîtrise des dépenses (de l’ordre de 1 à 2 milliards par an relativement à la tendance spontanée) devraient suffire à assurer la pérennité financière du système.

Si la situation macroéconomique était durablement très dégradée, le déficit de l’assurance maladie pourrait augmenter et la question des économies de dépenses se poser avec plus d’acuité. Deux options seraient ouvertes : soit accepter une nouvelle hausse du déficit, la solution de la question du financement ne pouvant résulter que d’un changement radical des politiques européennes ; soit renoncer à la reprise de la croissance et ajuster en conséquence les paramètres financiers de l’assurance maladie. Trois variables sont disponibles pour ajuster les comptes : la réduction tendancielle des dépenses, la hausse des prélèvements, la baisse des remboursements. Dans ce scénario noir de renoncement à la croissance, Il est vraisemblable que les pouvoirs publics cherchent à agir sur ces trois variables. La réduction tendancielle des dépenses est difficile à envisager alors que les besoins liés à la croissance démographique et au vieillissement continueront à croître et que la tendance spontanée est déjà modérée. La hausse des prélèvements est envisageable, mais elle entrerait en concurrence avec les hausses de fiscalité destinées à financer les autres dépenses publiques. Quant à la baisse des taux de remboursement elle peut difficilement s’appliquer de manière uniforme alors que la prise en charge des dépenses courantes de médecine de ville est déjà très faible.

La seule voie qui n’a pas encore été empruntée est celle du remboursement sous conditions de ressources qui implique une forte hausse de la participation financière des ménages les plus aisés. Cette mesure permettrait sans doute de limiter les déficits mais fragiliserait le système qui pour les plus riches deviendrait de plus en plus coûteux, ce qui les pousserait à soutenir le passage à un système d’assurance privé excluant toute redistribution entre riches et pauvres.