L’élection de Donald Trump à la fin de l’année 2024 a suscité une réévaluation des anticipations d’inflation, mais avec, sans surprise des effets contrastés entre les États-Unis et la zone euro.
Aux États-Unis, l’enquête réalisée par la Réserve fédérale de Philadelphie auprès des prévisionnistes (Survey of Professional Forecasters, SPF) montre un déplacement marqué de la distribution des anticipations pour 2026 entre l’enquête réalisée au quatrième trimestre 2024 et celle du troisième trimestre 2025. La probabilité associée à des niveaux d’inflation supérieurs à 3 % s’est accrue de manière notable, traduisant une perception plus forte des risques inflationnistes. Cette révision à la hausse peut refléter plusieurs facteurs anticipés par les professionnels : hausse des droits de douane et impact de la guerre commerciale sur biens importés, expansion budgétaire ainsi que les incertitudes entourant l’orientation de la politique monétaire, voire l’indépendance de la Réserve fédérale.
Dans la zone euro, les résultats du SPF de la Banque centrale européenne (BCE) pour 2026 montrent au contraire une stabilité des anticipations. Pour 2026, la distribution des prévisions reste centrée autour de 2 %, dans un intervalle compris entre 1,8 % et 2,2 %, confirmant que les anticipations d’inflation demeurent ancrées sur la cible de la BCE. Les chocs extérieurs liés à la politique américaine — droits de douane, tensions commerciales, fluctuations du dollar et des prix de l’énergie — semblent donc avoir eu un impact limité sur les anticipations des prévisionnistes européens, qui continuent de privilégier un scénario de stabilité à moyen terme.
Les anticipations des ménages américains ont toutefois évolué de manière plus marquée. Selon les données du Michigan Survey, l’inflation anticipée à un an dépassait 6% en janvier, avant un reflux progressif vers environ 4,8 % au printemps. Ce niveau demeure largement supérieur à l’inflation anticipée par les professionnels, illustrant une inquiétude plus vive du grand public face à la persistance des pressions inflationnistes. Ce décalage entre la perception des ménages et celle des experts souligne les difficultés de la Réserve fédérale à maintenir un ancrage homogène des anticipations dans un contexte international instable. L’enquête réalisée auprès des ménages de la zone euro (Consumer Expectations Survey) illustre également le décalage entre les anticipations des ménages et celles des professionnels. Mais là encore, les données montrent une inflation anticipée à un an bien plus proche de la cible de 2% dans la zone euro (3,1% en août 2025).
En résumé, l’élection américaine a eu un effet haussier perceptible sur les anticipations d’inflation aux États-Unis, mais pas en zone euro. Cette divergence illustre la différence de sensibilité des anticipations professionnelles aux politiques économiques nationales et confirme le rôle stabilisateur de l’ancrage crédible de la BCE.
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